Un auto-entrepreneur est un travailleur indépendant. Il se distingue radicalement d’un travailleur salarié dans la mesure où il n’est pas dans une situation de subordination vis-à-vis d’un employeur.
Cette question est primordiale car les enjeux financiers sont très importants. De nombreuses entreprises ont désormais recours à des auto-entrepreneurs en tant que sous-traitants pour des tâches qu’ils confiaient auparavant à des salariés. Il n’est nullement nécessaire d’en présenter les avantages côté entreprise…
Un employeur peut-il proposer à ses salariés (avec leur accord) de devenir auto-entrepreneurs et de continuer à travailler dans les mêmes conditions mais avec des charges sociales (et une protection sociale) réduites ?
Certainement pas. Car si l’entreprise utilise les services de l’auto-entrepreneur de la même manière que ceux d’un salarié, elle court le risque d’une requalification pure et simple du contrat dans sa formule la plus favorable pour le travailleur : le contrat de travail à durée indéterminée. Cette remise en cause peut être le fait du salarié mais également de l’URSSAF à l’occasion d’un contrôle.
Pour différencier ces deux contrats (contrat de travail et contrat de sous-traitance) il convient d’apprécier les liens entre le donneur d’ordre (ou l’employeur) et l’auto-entrepreneur (ou le salarié). Et c’est un faisceau d’indices qui permet de les qualifier :
un contrat écrit définit la relation entre les parties (contrat de sous-traitance dans le cas de l’auto-entrepreneur, contrat de travail pour le salarié) ;
le nombre de clients de l’auto-entrepreneur n’est pas limité alors que le salarié n’a souvent qu’un employeur ;
l’auto-entrepreneur utilise généralement son matériel alors que le matériel utilisé par un salarié est fourni par l’entreprise ;
l’auto-entrepreneur a une rémunération variable en fonction de son travail alors que le salarié est mensualisé ;
l’auto-entrepreneur dispose d’une totale liberté d’action alors que le planning de travail du salarié est généralement fixé par l’employeur…
Mais la loi (art ; L. 8221-6 4° du code du travail) pose le principe de la non présomption d’un contrat de travail dans le cas de l’exécution d’une activité donnant lieu à immatriculation ou inscription. Dès lors c’est au salarié (ou à l’URSSAF) de démontrer qu’il y a un contrat de travail et non un contrat de sous-traitance.
Un arrêt de la Cour de Cassation du 20 octobre dernier est plutôt rassurant en la matière : dans le cas d’un chauffeur-livreur qui utilisait le camion de son donneur d’ordre, il a été jugé qu’il n’agissait pas comme un salarié car il gérait lui-même ses horaires. Par ailleurs une correspondance indiquait qu’il avait lui même proposé le tarif de sa prestation au donneur d’ordre.
Il semble donc que ni la jurisprudence, ni même l’URSSAF, ne poussent à la requalification du statut d’auto-entrepreneur en statut salarié. On peut même se demander si cette souplesse totale de l’auto-entreprise n’est pas souhaitée pour atténuer le poids d’un Code du Travail impossible à réformer…
Pour autant, il convient de rester vigilant compte tenu des risques encourus : la requalification serait très lourde de conséquences pour l’entreprise qui serait contrainte de régulariser des salaires, des congés, des indemnités de licenciement sans causes réelles et sérieuses… et toutes les charges sociales qui y sont liées.
Cass. soc. 20 octobre 2015 n° 14-16.179 (n° 1714 F-D)
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